Lire à voix haute

lire à voix haute

Ce matin, j’ai fait la lecture à des quatrième. Je leur ai lu des morceaux du deuxième roman d’un auteur qui viendra nous visiter jeudi. Je ne sais pas encore bien m’y prendre, mais en grande amoureuse de Daniel Pennac, j’ai commencé par leur dire qu’ils avaient le droit de s’installer confortablement sur leur table et leur chaise, et même de n’écouter que d’une oreille, mais qu’il fallait de leur part un silence total pour laisser une chance à l’histoire de trouver une place dans leur esprit. Leur professeur de français a eu la brillante idée de leur faire ranger toutes leurs affaires pour qu’ils arrêtent de jouer avec leurs trousses.

Après je me suis installée sur mon bureau, en tailleur. Je les ai regardé, leurs visages un peu blasés, l’air de dire « on n’est plus des bébés ». D’autres étaient attentifs. Certains s’étaient complètement affalés sur leur table, pull calé sous la tête comme coussin. Silencieux. Satisfaite, je pris ma respiration et commençait.

Au début j’ai lu sans les regarder. Je me concentrais sur ma bouche. Sur mes lèvres. Sur les mots. Pour qu’ils aient du sens ailleurs que dans ma tête. Et doucement, l’histoire s’est mise à couler. Je la faisais trébucher, parfois, mais dans l’ensemble ça allait. Au fur à mesure que je lisais, mes mains s’agitaient, mes sourcils se fronçaient. Je jouais le livre.

Et puis j’ai réalisé ce que j’étais en train de faire. Je lisais un livres à des adolescents, comme Daniel dans Comme un roman. Je commençais à lever les yeux sur les élèves. Hormis quelques uns qui continuaient à somnoler, la plupart écoutaient. Les yeux dans le vague, une jouait avec les cheveux de sa copine, un autre avec ses doigts. Leur professeur regardait par la fenêtre. C’était un joli instant.

Un passage drôle, ils rient. Un passage triste, ils soupirent. Moment d’empathie total, et sans s’en rendre compte, ils sont ensembles. Ces élèves qui, en temps normal, sont embourbés dans des guerres de clans, se retrouvent à ressentir des choses similaires, chacun avec leur sensibilité.

Et puis voilà que l’attention se crispe ; je devine un début d’impatience. C’est drôle comme le silence et l’attention permettent de créer des connections invisibles. Je finis mon chapitre. Leur professeur leur dit qu’on s’arrête là et leur donne les consignes pour la suite de la séance. J’entends une élève chuchoter « oh non, j’étais vraiment dans l’histoire là ».

La prochaine fois je lirais un peu plus loin…

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